Ivan Argote

Technique mixte

H.73,5 x L.62 cm

H.89,5 x L.76 cm (avec cadre)

Bio

1983 Naissance à Bogotá, en Colombie.

2006 Ivan Argote s’installe à Paris et rentre à l’Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts (ENSBA), dont il sort diplômé en 2009.

2011 Il est lauréat du SAM pour l’art contemporain avec La estrategia, projet pour lequel il se met dans la peau d’un groupe clandestin colombien à l’origine des partis de gauche des années 70. La estrategia est présenté l’année suivante au Palais de Tokyo.

Aujourd’hui, ses créations plastiques, ses vidéos et ses performances sont présentées aux quatre coins du monde, de Bruxelles à Sao Paulo, de Paris (Galerie Perrotin, Palais de Tokyo…) à Barcelone (Galeria ADN, Joan Miró Fundation), Bruxelles, Madrid ou Dubaï.

Libération 2016

Les révoltés de l'austérité

Par Ivan Argote (1983, Colombie)

« Les archives, surtout imprimées, sont une matière première conséquente de mes récents travaux. Je mène actuellement des recherches liées à la propagande durant la guerre froide, dans la continuité de mon projet See? it’s true, qui met à nu des choix idéologiques de Kodak. Dans les années 60, la société réalisa que les images Kodachrome viraient au rouge avec le temps, et opta pour le processus Ektachrome qui au contraire provoquait des teintes bleues ! Je procède par collages, découpe, suppression, fragmentation des documents collectés, pour une construction allégorique de l’histoire. J’aime créer plusieurs filtres, superposer les temporalités. Détruire pour donner du sens : c’est cette démarche que je développe pour la une de Libération sur la crise grecque. Le visuel original choisi a une fonction informative mais surtout accrocheuse : la transformation que je lui inflige crée une distance par rapport à cet objectif initial. J’ai utilisé deux exemplaires de l’image de couverture. J’ai dégradé le premier pour n’en garder qu’une maille lâche et fragile, dont on ne reconnaît que des bribes. La découpe au laser brûle le papier, renforçant l’idée de destruction et de blessure. Le second exemplaire, moins abîmé, apparaît en décalage, créant la sensation floue d’un déjà-vu. La superposition imparfaite rend l’image illisible, et donne à voir les répétitions de l’histoire. Un bégaiement dont cette archive de 2011 apporte la preuve, Les révoltés de l’austérité étant malheureusement un titre qui garde toute son actualité en 2015. Il y a une forme de fatalisme cynique à observer ce rebond de l’histoire en Grèce, alors même qu’Alexis Tsipras a été élu sur la promesse de son opposition à l’austérité. Il s’agit là d’une critique de l’Europe et de son impuissance, mais plus largement des Etats et de leurs limites. Produire un nouveau rapport à l’objet est une constante de mon travail. Je détourne les images incarnant l’autorité, de manière souvent agressive, parfois provocante, sentimentale, ou même drôle, comme dans Summer Time, où je filme une voiture de police s’agitant, comme secouée par des ébats amoureux. Si ma démarche n’est ouvertement ni militante ni partisane, elle pose la question de la place de l’être humain en politique et en société. J’aime associer les anecdotes du quotidien à une histoire et une actualité plus globales, pour questionner la manière dont celles-ci se construisent et s’écrivent.»

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