Invader

Acrylique sur impression papier 210g

H.75 x L.60,5 cm

H.89,5 x L.76 cm (avec cadre)

Bio

1969 Naissance, quelque part.

1996 Premier space invader posé dans une ruelle du XI° arrondissement de Paris.

1998 L’Invasion commence réellement. Les mosaïques se multiplient dans la capitale, puis très rapidement dans le reste du monde.

2005 Création du Rubikcubisme. Invader s’empare du casse-tête des années 80 pour créer des tableaux pixelisés.

11 juin 2011 Invasion de l’édition Week-end de Libé. Des space invaders apparaissent sur la Une et s’incrustent dans les titres.

20 août 2012 Première incursion dans l’espace. La mosaïque SpaceOne est envoyée dans la stratosphère à l’aide d’un ballon météorologique. Un film, Art4Space, raconte cette aventure.

Juillet 2014 Lancement de l’appli Flashinvaders. Elle permet, en flashant les mosaïques, de les identifier et de cumuler des points.

12 mars 2015 La spationaute italienne Samantha Cristoforetti fixe la mosaïque « Space2 » sur une porte du module Columbus de la Station Spatiale Internationale. Invader devient le premier artiste à exposer à 400 km de la terre.

Libération 2016

Japon La Cicatrice

Par Invader (1969, France)

« Lorsque je regarde cette image, je vois comme un lever de rideau sur une immense catastrophe. Cette une “Fukushima” me touche plus qu’une autre car, quelques mois avant, j’étais au Japon. J’ai donc vécu l’accident nucléaire avec un regard particulier, je m’en suis senti proche. Et puis, disons le, je n’échappe pas à cette fascination très humaine pour le catastrophique, pour le sublime de la destruction, pour cette atmosphère de fin du monde nucléaire. Quelques temps plus tard, je suis retourné au Japon. Au programme : une nouvelle invasion de Tokyo. Cette série de mosaïques a été très influencée par Fukushima. Outre plusieurs mosaïques phosphorescentes, qui irradient dans la nuit, j’ai notamment posé sur un mur de la capitale un Astroboy, en vol. Le personnage d’Astroboy, petit robot iconique né dans le manga japonais des années 50, s’appelle en réalité “Atome”. Il porte en lui une pile nucléaire. Aussi, sous ses dehors proprets, il est en fait animé par cette énergie démente. D’ailleurs, dans la série japonaise, juste après sa création par un gentil savant, il fait plein de bêtises car il ne maîtrise pas sa force. A mes yeux, il incarne parfaitement la dualité de cette énergie à la fois attirante et terriblement inquiétante. Outre Fukushima, qui m’a donc happé et inspiré, le Japon tient depuis peu une place un peu particulière dans mon parcours d’artiste. Ma dernière escapade nippone, en mai 2014, s’est en effet très mal passée. Mes interventions dans Tokyo ont généré une réaction ahurissante des autorités. Je n’avais jamais vu ça en vingt-cinq ans de street art. Après mon passage, quelques proprios se sont plaints de mes œuvres sur leurs murs. Jusque-là rien d’exceptionnel, ça arrive souvent. Grosso modo, chaque invasion se solde par environ 10% de perte. Soit quelques mosaïques rapidement enlevées. Sauf que la police tokyoïte, désœuvrée et peut-être en proie à l’ennui, a décidé de prendre tout cela très au sérieux. Grâce aux caméras de vidéosurveillance, ils nous ont identifiés. J’étais pour ma part déjà rentré à Paris, mais ils n’ont pas loupé mes acolytes locaux. Un fan de mon travail, rencontré sur le réseau social Instagram, et qui m’a beaucoup aidé dans les repérages et la mise en place de mon invasion, a été arrêté et incarcéré. Le pauvre a été traité comme un criminel : quinze heures d’interrogatoire quotidien, à se voir demander, en boucle, “Qui est Invader et que sais-tu de lui?”. Pendant vingt jours. Un photographe local, qui avait suivi mon invasion, mais aussi un galeriste ont aussi été arrêtés. Même régime, vingt jours de détention préventive. Les autorités ont fini par avoir mon nom. Aujourd’hui, je ne peux plus retourner au Japon. Cela me fait de la peine : le Japon est quand même le pays d’origine des space invaders. Cette histoire, c’est la première fois que je la raconte publiquement. A l’époque, mes trois “complices” m’ont demandé de ne rien dire, pour protéger leur réputation et ne pas envenimer les choses. Je me suis senti très impuissant, depuis Paris, alors qu’ils crou-pissaient derrière les barreaux pour de malheureuses mosaïques collées sur des murs. Paradoxalement, mes pièces de Tokyo sont très appréciées. Elles sont continuellement photographiées et flashées. S’agissant de mon travail sur cette une, j’ai hésité quant au médium. J’ai finalement choisi, chose assez rare, d’intervenir à la peinture. »

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